
Connexions entre toulouse et marseille : "une association d’intérêts de malfaiteurs" pour le spécialiste de la criminalité organisée thierry colombié
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l'essentiel Thierry Colombié, écrivain, spécialiste de la criminalité organisée vient de publier un nouveau livre, "Une légende corse". Entretien. La présence de trafiquants
marseillais et leur implication, notamment dans des "jambisations", est de plus en plus prégnante à Toulouse. Sont-ils là pour prendre des territoires ? Il ne faut surtout pas
réduire leur présence à la prise d’un point de deal ou à un règlement de compte. Il faut envisager d’autres hypothèses. Quelles sont-elles ? La première est commerciale : peu importe leur
origine géographique, les équipes de trafiquants s’associent pour acheter de gros volumes de marchandises. Elles se fournissent auprès d’un même fournisseur, se font livrer à domicile, ce
qui leur permet de minimiser les coûts et les risques. Il est donc normal de retrouver des Marseillais à Toulouse, et inversement, pour discuter des modalités relatives à ce type
d’association illégale de commerçants, même si certains ont aussi pignon sur rue. Pourquoi ces deux villes ont-elles des connexions ? Marseille et Toulouse sont des plateformes de
distribution régionale et nationale d’herbe espagnole, de résine marocaine et de cocaïne sud-américaine, des narcohubs gérés principalement par des courtiers de la Mocro Maffia, un
agglomérat de groupes criminels issus de la Camorra, des cartels sud-américains, du Kinahan irlandais, de groupes albanais, turcs et bien évidemment marocains. C’est un business qui, depuis
au moins quarante ans, ne s’arrête jamais, qui anticipe les actions policières et mobilise jour et nuit des milliers d’individus partout en Europe. Quelle est l’autre hypothèse ?
Concurrentielle. Dans ce milieu, tout se sait, à commencer par la difficulté, souvent financière, que peut rencontrer le gérant d’un réseau de vente, soit un point de deal et/ou un système
de livraison à domicile ce que l’on appelle l’ubérisation du trafic. Dans ce cas, le représentant d’une équipe, marseillaise ou pas, va se déplacer à Toulouse, et venir discuter avec le
gérant. Contrairement à ce que l’on croit, ce ne sont pas les coups de feu qui font la loi, mais bien plus souvent l’aboutissement d’une longue et discrète négociation. Tuer, c’est attirer
la police, briser le business. Personne n’a intérêt à supprimer un concurrent ou autres, sauf ceux qui se croient au Far-West. Mais à bien mal acquis ne profite jamais. La présence des
Marseillais peut-elle s’expliquer d’une autre façon ? Pour leur compétence, filer un coup de main surtout si les équipes sont associées : gestion, ressources humaines, transport, marketing,
corruption, blanchiment… Gérer un réseau de vente, du gros au détail, ce n’est pas une mince affaire. Le responsable se retrouve face aux mêmes problématiques que celui qui gère une
entreprise légale, avec les policiers en plus sur le dos. Qu’il soit Marseillais, Lyonnais ou Parisien, c’est avant tout un commerçant qui cherche à maximiser son profit, à monter dans la
hiérarchie d’un système monstrueux d’une puissance redoutable tant militaire que financière. *Thierry Colombié vient de publier un nouveau livre, "Une légende corse", Nouveau monde
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