Facebook : des bénéfices économiques, un déficit en termes d’image

Facebook : des bénéfices économiques, un déficit en termes d’image


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FACEBOOK, UN MÉDIA COMME UN AUTRE ? - ÉPISODE 2/5 Facebook doit faire face à une profonde mutation, son modèle économique reposant sur la publicité et ses ventes de données aux acteurs


économiques. L’entreprise est devenue tentaculaire, ses rachats de sociétés, très nombreux. Son image, dégradée, anticipe-t-elle des difficultés à venir ? Jean-Paul Simon Publié le 25


septembre 2018 Après la large couverture de presse suscitée par le dossier Cambridge Analytica (utilisation frauduleuse de données personnelles issues de Facebook), Facebook a de nouveau


fait les titres de l’actualité avec, fin juillet 2018, une chute impressionnante de sa capitalisation boursière, de près de 125 milliards de dollars. Toutefois, malgré l’ampleur de cette


chute il faut se garder de conclusions hâtives pour plusieurs raisons. D’abord, la capitalisation boursière (valeur du cours de l’action multipliée par le nombre d’actions) est un outil très


imparfait de mesure des performances économiques d’une entreprise. De fait, la société de Menlo Park a vu son chiffre d’affaires passer de 27,63 milliards de dollars en 2016 à 40.65


milliards en 2017, et les derniers résultats du second trimestre 2018 montraient encore une croissance de 42 % de ce chiffre d’affaires par rapport au second trimestre 2017. Les variations


de la capitalisation renvoient plus aux anticipations (positives ou négatives) des investisseurs qu’à la santé économique de l’entreprise. Selon les estimations du président de la Commission


de la concurrence australienne(Australian Competition and Consumer Commission), de 65 à 80 % de cette valorisation pourrait être attribuée à la seule espérance de croissance future, contre


40 à 60 % pour Google. Facebook a d’ailleurs connu un épisode semblable après l’ouverture de capital en 2012. Après avoir recueilli 16 milliards de dollars — alors l’une des plus importantes


ouvertures de capital dans l’histoire des sociétés de haute technologie et d’Internet —, la société verra son cours de bourse perdre plus de 50 % de sa valeur lors des mois qui suivront. Le


tableau 1 indique que la recette nette s’était effondrée en 2012, passant d’un milliard de dollars à 55 millions. Il faudra plus d’un an pour retrouver le cours d’ouverture. Rappelons


aussi, qu’en mai 2018, la capitalisation boursière de la société atteignait 538 milliards de dollars. Pour comprendre ces mouvements boursiers erratiques, il convient donc de bien saisir le


modèle économique de Facebook, ses inflexions et la stratégie de l’entreprise depuis sa création avant de s’interroger sur son devenir. UN MODÈLE ÉCONOMIQUE FONDÉ SUR LA PUBLICITÉ ET SON


CONTRÔLE Facebook est un réseau social qui permet à ses utilisateurs de créer un profil afin de se connecter à leur famille et « amis », ainsi qu’à de nouveaux contacts. Les utilisateurs


peuvent mettre à jour ce profil, en ajoutant informations et images, envoyer et recevoir des messages des autres utilisateurs. Les utilisateurs ont la possibilité de créer des pages sur des


sujets variés (loisirs, sports, finance, culture, hobbies..). Lors de la création de la société en 2004, la mission initiale avait été définie de la façon suivante : « Facebook vise à


favoriser le partage entre les gens et à rendre le monde plus ouvert et connecté », à « donner le pouvoir de partager » ajoute la version anglaise de cette mission._ _ > Le chiffre 


d’affaires a connu une progression fulgurante depuis la > création de la société Le service offert aux utilisateurs étant gratuit, les recettes proviennent de la vente d’espaces


publicitaires à différentes catégories d’annonceurs : marques, sociétés de marketing direct, petites et moyennes entreprises et développeurs. Le chiffre d’affaires a connu une progression


fulgurante depuis la création de la société. En 2009, la société récoltait 777 millions de dollars. En 2017, ce chiffre d’affaires dépassait 40 milliards, un chiffre en augmentation de 47 %


par rapport à l’année précédente. Le tableau 1 montre l’évolution de ce chiffre d’affaires depuis 2009. Le tableau indique aussi que la société aura été très vite bénéficiaire, à la


différence d’autres sociétés Internet, telle Twitter qui peine toujours à atteindre une quelconque rentabilité (la société, créée en 2006, ne fait de bénéfices que depuis 2018). En juin


2018, la société employait plus de 30 000 personnes dans le monde, contre 4 600 en 2012. Facebook est présent dans 39 pays et a créé six centres d’exploitation et de traitement de données


dans le monde (Canada, Danemark, États-Unis, Irlande, Suède et Singapour) et s’apprête à en ouvrir deux autres. ÉVOLUTION DU CHIFFRE D’AFFAIRES (2009-2017), EN MILLIONS DE DOLLARS US _Source


_: compilé par l’auteur à partir des rapports annuels > Les recettes publicitaires assurent la quasi-totalité des recettes Les recettes publicitaires assurent la quasi-totalité des


recettes, soit 39,94 milliards de dollars en 2017, une augmentation de 49 % sur l’année précédente. Elles proviennent des publicités sur les différentes plateformes de la société soit


Facebook, Instagram, Messenger, ainsi que des sites de tiers ou des applications mobiles. Les annonceurs paient les publicités pour les produits directement ou par l’intermédiaire d’agences


de publicité, sur la base de l’affichage de la publicité auprès de l’usager ou du nombre d’actions (les clics) des utilisateurs. Les autres recettes, dont celles provenant des développeurs


(commissions pour l’utilisation de l’infrastructure de paiement) sont marginales. Ainsi, pour les jeux vidéo, Zynga a assuré son premier développement par la vente d’objets virtuels. Zynga


sera présente sur Facebook dès 2007. Zynga fournissait d’ailleurs en 2012 l’essentiel de ces recettes marginales, selon le rapport annuel de cette année. Facebook fournit néanmoins des


outils pour les développeurs et des interfaces de programmation applicative (API : A_application Programming Interfaces_), ne serait-ce que pour accroître l’attractivité de ses services,


comme ce fût le cas avec les jeux vidéo exclusifs de Zynga. > Dans ce contexte de dépendance des revenus de la publicité, > Facebook a mis progressivement au point des mesures 


d’analyse > très sophistiquées, afin de suivre la croissance des utilisateurs > et de commercialiser cette audience auprès des annonceurs Dans ce contexte de dépendance des revenus de


la publicité, Facebook a mis progressivement au point des mesures d’analyse très sophistiquées, afin de suivre la croissance des utilisateurs et de commercialiser cette audience auprès des


annonceurs. Il s’agit avant tout du nombre d’utilisateurs quotidiens actifs (DAU : _Daily Active Users_) et du nombre d’utilisateurs mensuels actifs (MAU : _Monthly Active Users_). Ainsi, un


utilisateur quotidien actif est un utilisateur qui s’est enregistré pour un jour spécifique sur le site, ou sur un mobile ou encore a utilisé l’application Messenger en tant qu’utilisateur


enregistré par Facebook. Facebook définit de la même façon l’utilisateur mensuel actif. La société se sert du ratio DAU/ MAU pour mesurer l’implication de l’utilisateur. À ces indicateurs


s’ajoutent leurs déclinaisons mobiles (nombre d’utilisateurs mobiles quotidiens actifs) à partir d’applications mobiles ou de la version mobile du site, et la recette moyenne par utilisateur


(ARPU : _Average Revenue Per User_). On notera, qu’à la différence de la publicité à la télévision ou dans la presse, ces mesures d’audience ne relèvent que de Facebook, qui les calcule à


partir de ses données internes sur l’activité des utilisateurs. Elles sont donc fondées sur ce que la société juge une estimation « raisonnable » de la base d’utilisateurs sur une période


donnée. > À partir de 2012, ce sont les mobiles qui vont porter l’essentiel > de la croissance Le graphique ci-dessous donne l’évolution de la moyenne de ces utilisateurs quotidiens


actifs de 2014 à 2017. Ces données incluent Messenger mais pas Instagram, Oculus ni WhatsApp. Au plan mondial, cet indicateur atteignait 1,40 milliards d’utilisateurs en 2017, une


augmentation de 14 % sur 2016. Cet indicateur s’élevait à seulement 360 millions en 2009, avant que la société n’entame son tournant mobile à la suite de l’introduction des smartphones. À


partir de 2012, ce sont les mobiles qui vont porter l’essentiel de la croissance. De 101 millions d’utilisateurs quotidiens mobiles actifs en 2009, l’indicateur passera à 680 millions en


2012, soit plus de la moitié des DAU cette même année (1,56 milliards), porté par la croissance mondiale des mobiles, notamment au Brésil, en Inde et aux États-Unis. Désormais, les


utilisateurs mobiles sont dominants et la société ne sépare plus le mobile du fixe dans ses comptes. La moyenne des utilisateurs mensuels actifs connaitra une croissance similaire, de 14 %,


en 2017, pour atteindre 2,13 milliards d’utilisateurs. ÉVOLUTION DE LA MOYENNE DES UTILISATEURS QUOTIDIENS ACTIFS DE 2014 À 2017 (DAILY ACTIVE USERS) _Source_ : rapport annuel 2017. La


recette moyenne par utilisateur (ARPU) est également en augmentation (de 26 % entre 2016 et 2017) atteignant 20,21 $. La plus forte croissance ayant eu lieu en Europe (41 %) — le périmètre


géographique n’est pas précisé, il inclut sans doute la Russie —, suivie par l’Amérique du Nord (États-Unis et Canada avec 36 %), 33 % pour le reste du monde et, enfin, 22 % pour la zone


Asie-Pacifique. Ces deux dernières zones géographiques génèrent des recettes moyennes inférieures à celles des zones les plus développées (celles de l’Amérique du Nord sont plus de neuf fois


plus importantes que celles de l’Asie-Pacifique), mais en même temps elles constituent des zones de croissance. Brésil, Inde, Indonésie et Vietnam ont connu de très fortes zones de


croissance en 2017. En effet, si le nombre d’utilisateurs actifs quotidiens est plus important en Asie-Pacifique et dans le reste du monde, avec respectivement 36 % et 31 % (en décembre


2017) de ceux-ci (il en va de même pour les actifs mensuels), la répartition géographique des recettes est dominée par l’Amérique du Nord (près de 48 %) et l’Europe (plus de 20 %) soit près


de 70 % du total pour les seuls marchés développés. DU PC AUX MOBILES : LA GALAXIE FACEBOOK ET SON ÉVOLUTION Les débuts de Facebook et les relations tumultueuses entre Mark Zuckerberg (CEO),


et les autres co-fondateurs (Eduardo Saverin, Andrew McCollum, Dustin Moskovitz, et Chris Hughes) ont inspiré des œuvres diverses (par exemple, cf. le film _Le réseau social_ en 2010, ou


l’ouvrage dont il a été tiré. Désormais, Mark Zuckerberg détient la majorité des droits de vote, comme le soulignent les rapports annuels. Il détient la haute main sur sa société ; il est


donc raisonnable de lui imputer la stratégie de l’entreprise dans sa continuité. Avant de présenter l’état actuel de la « galaxie » Facebook, il est pertinent de rendre compte de son premier


virage stratégique : le tournant mobile de 2009 lors de l’introduction de la version mobile de son site. En effet, nombre d’acquisitions ultérieures résultent de cette option stratégique.


> La société de Menlo Park comprendra assez vite que l’iPhone, > introduit en 2007, allait jouer un rôle majeur dans la migration > vers de nouveaux usages La société de Menlo Park


comprendra assez vite que l’iPhone, introduit en 2007, allait jouer un rôle majeur pour l’accès à de nouvelles clientèles et la migration vers de nouveaux usages. La société prendra ainsi le


pari de l’Internet mobile, estimant que les smartphones et les réseaux qui les soutenaient offriraient une approche plus attractive de l’Internet fixe pour lequel la société avait développé


initialement son service. Non seulement la croissance des données dans les marchés les plus développés s’est accélérée depuis, mais le mobile deviendra de plus en plus le mode de


communication par défaut le plus répandu dans le monde(1). Ainsi, pour de nombreux utilisateurs, en particulier dans les économies en développement, Facebook va devenir synonyme d’Internet


dans sa version mobile. En 2008, Facebook lancera sa première « app » pour mobile (Facebook Chat) quelques mois avant d’introduire sa version pour iPhone. D’ailleurs, dans l’écosystème en


voie de constitution des smartphones, Apple sera l’un des premiers annonceurs sur Facebook. Par la suite, à partir de 2010, les apps de conversation (« chat ») tels que Messenger de


Facebook, WhatsApp ou WeChat de Tencent dépasseront les réseaux sociaux plus conventionnels à consulter sur PC. Facebook va donc accompagner sa base de clientèle utilisant des ordinateurs de


bureau au mobile, et gagner les nouveaux usagers du mobile. En 2012, elle introduira la publicité sur mobile à partir du News Feed pour ne pas perturber l’expérience de l’utilisateur. Dès


l’année suivante, les recettes mobiles représenteront plus de 40 % du total des recettes. Cette évolution permet de comprendre l’acquisition d’abord d’Instagram, en 2012 pour 1 milliard de


dollars. Celle de WhatsApp suivra en 2014. Auparavant, dans la même logique d’extension mobile, Facebook tentera sans succès d’acquérir Snapchat en 2013 pour 3 milliards de dollars. Compte


tenu de l’enjeu stratégique représenté par WhatsApp, Facebook déboursera finalement 19 milliards de dollars, pour renforcer son approche mobile grâce à cette « app » conversationnelle au


développement fulgurant, ayant atteint plus de 400 millions d’utilisateurs en seulement quatre ans, soit une croissance encore plus rapide que celle de Facebook. L’acquisition d’Oculus VR,


en 2014, pour deux milliards complétera son portefeuille d’activités. La galaxie Facebook comprend donc Facebook en tant que tel, News Feed étant le principal outil d’implication des usagers


sur Facebook, fournissant des séries d’histoires et de publicités à partir d’un algorithme. Messenger est l’application de messagerie accessible sur une variété de plateformes et de


terminaux. WhatsApp est l’application conversationnelle pour smartphone. Instagram est un réseau social, créé en 2010 pour les mobiles, une communauté d’échanges visuels à base de photos,


vidéos et messages directs. Oculus est une plateforme de réalité virtuelle et de contenus qui permet une interaction immersive, par exemple pour des jeux ou d’autres contenus. La société a


acquis, en tout, environ 76 sociétés outre ces dernières. Elle recense 26 filiales dans ses rapports annuels, dont les filiales irlandaises qui servent avant tout à de l’optimalisation


fiscale ! UNE STRATÉGIE PAYANTE La chute de sa valeur boursière n’empêche pas la société de suivre l’itinéraire stratégique qu’elle a auparavant affiché. Elle avait, d’ailleurs, anticipé et


annoncé une telle chute dans son dernier rapport annuel, dans la partie soulignant les risques encourus(2), notant que le déclin probable de son taux de croissance, notamment en raison d’une


pénétration accrue, aurait des effets négatifs sur la perception des investisseurs pouvant se traduire par une chute du cours. La publication des derniers résultats trimestriels (2018) a


confirmé cette tendance à la décélération, mais aussi la croissance continue des couts réduisant la marge qui reste fort confortable néanmoins comme l’indique le tableau 1. Cette feuille de


route s’articule autour des axes suivants pour les investissements : dans les écosystèmes les plus développés autour des _app_ Facebook, de sa plateforme et des app vidéo ; poursuite de la


croissance et du développement de leurs autres écosystèmes notamment autour d’Instagram, Messenger et WhatsApp qui ont déjà des bases de clientèle massives (1 milliard d’utilisateurs pour


Instagram, 1,3 milliard pour Messenger, et 1,5 milliard pour WhatsApp en juillet 2018, ces deux dernières détenant les deux premiers rangs mondiaux devant WeChat, 1,040 milliard) ; et enfin


lancer des initiatives pour le long terme dans les domaines de la connectivité, de l’intelligence artificielle et des réalités virtuelles et augmentées. Les décisions récentes sont venues


concrétiser cette stratégie. Ainsi, Instagram s’est vu successivement enrichi par l’introduction de _z_, Direct et en juin dernier IGTV, concurrent potentiel de YouTube. Pour Mark Zuckerberg


il s’agit de revoir la vidéo mobile, partant du fait que la consommation de télévision diminue mais que celle de la vidéo augmente. Or, selon Facebook, la plupart des vidéos ne sont pas


optimisées pour les mobiles, d’où l’introduction d’un outil approprié : IGTV permet de publier des vidéos d’une heure contre seulement une minute auparavant sur Instagram. Plus tôt en 2017


la société avait lancé un service dédié sur Facebook, Watch. La société va continuer à s’appuyer sur les zones de fortes croissances des pays en développement. Elle vient d’obtenir


l’autorisation d’accéder au premier marché mondial pour les réseaux sociaux, la Chine, dont elle était bannie depuis près d’une décennie. Elle doit y ouvrir « un hub d’innovation » et donc


se concentrer, dans un premier temps, sur son savoir-faire en la matière Elle doit aussi tirer mieux parti de la demande croissante des entreprises chinoises pour la publicité en dehors de


la Chine. Jusqu’à présent, Facebook tirait l’essentiel de ses revenus publicitaires en Chine des jeux vidéo et des « apps ». Elle va donc s’efforcer de couvrir les exportations chinoises et


le commerce international.En effet, Facebook peut s'estimer idéalement placée pour profiter des offensives à venir des entreprises chinoises sur les marchés des pays développés, de


consommation comme d'équipements, vu son contrôle des données personnelles sur ces marchés. Toutefois, peu de temps après avoir accordé cette autorisation, les autorités chinoises sont


revenues sur leur décision. Enfin, en ce qui concerne les investissements dans les technologies du futur, Facebook investit dans les technologies visant une meilleure maîtrise des questions


de sécurité. La société est aussi particulièrement en pointe dans le domaine de l’intelligence artificielle. Elle a ainsi ouvert un laboratoire à Paris en 2013 et crée Facebook AI Research,


FAIR, en 2014. Comme le souligne Antoine Bordes, qui dirige le centre français du laboratoire de recherche en IA de Facebook : « Sur Facebook, il y a tant de contenus qu’on ne peut pas se


passer d’intelligence artificielle ». En ce qui concerne la connectivité, également un point clé pour le développement dans les nouveaux marchés où Facebook représente l’Internet, la société


soutient l’initiative d’internet.org, afin de d’amener l’Internet aux deux tiers de la planète qui n’en disposent pas. LES LIMITES DE L’ULTRA-PERSONNALISATION DE L’ENTREPRISE L’introduction


de ces nouveaux services contribue à l’augmentation des coûts que nous avons soulignée. Il est prématuré de s’interroger sur le devenir des nouveaux services de contenus vidéo, même si


Watch pour l’instant ne semble pas encore arriver à attirer les utilisateurs de Netflix ou YouTube. Comme les autres nouveaux services (tels que Stories), le mode de monétisation est encore


incertain, la mise en place risque de prendre du temps. La société reconnait d’ailleurs le fait pour Messenger, mais juge utile de prendre le temps de renforcer l’expérience du consommateur.


Toutefois, comme l’a montré l’exemple des jeux vidéo, les recettes provenant de l’ensemble des contenus sont marginales, il est probable qu’elles le demeureront. Le cœur du modèle


d’affaires reste la publicité et une croissance de l’audience peut se traduire par une croissance de ce chiffre d’affaires. Malgré la perte (en réalité virtuelle) de plus de 100 milliards de


capitalisation boursière, le modèle économique est sain, les comptes de la société sont fort robustes et devraient permettre de continuer à financer une poursuite de la croissance, même


plus modérée. Les investisseurs peuvent renâcler devant des marges qui se réduisent, mais elles restent très confortables, voire enviables pour bon nombre d’entreprises. De plus, l’exemple


d’Amazon montrent qu’ils peuvent accepter des marges plus que réduites et l’absence de distribution de bénéfices. > Le principal problème peut venir de la poursuite de la dégradation >


 de l’image de la société Le principal problème peut venir de la poursuite de la dégradation de l’image de la société. Les questions de protection de données personnelles deviennent de plus


en plus sensibles, et pas seulement en Europe suite à l’adoption du règlement général sur la protection des données (RGPD). La presse indiquait que la démission du fondateur de WhatsApp


aurait été liée à un conflit autour de l’utilisation des données personnelles. Il semblerait que depuis la création de la société, Mark Zuckerberg n’ait pas considéré qu’il s’agisse d’une


priorité (cf. le point de vue, tranché, de Jean-Louis Gassée dans MondayNote à propos de Cambridge Analytica : « Mark Zuckerberg Thinks We’re Idiots »). Il a eu du mal à convaincre lors des


enquêtes parlementaires aux États-Unis ou en Europe. Or, si Facebook est le stéréotype « de la startup ayant réussi », il en est incontestablement la vedette, avec donc les risques que peut


comporter l’ultra-personnalisation de l’entreprise. Ainsi, une défiance accrue, pourrait entraîner une suspicion sur la réalité des audiences, de la part des annonceurs vis-à-vis des données


que seule Facebook leur fournit, voire favoriser un concurrent qui offrirait des données garanties par un tiers de confiance tels qu’il en existe dans les médias, en tout cas atteindre le


cœur du modèle économique. Les doutes qui sont apparus sur la valorisation de Facebook ne sont pas des doutes sur sa solidité. Ce sont en réalité tous les modèles de tous les acteurs


installés depuis longtemps sur ce marché publicitaire sur Internet qui paraissent désormais très fragiles et nécessitent des adaptations rapides, voire des recompositions. À LIRE ÉGALEMENT


DANS LE DOSSIER _FACEBOOK, UN MÉDIA COMME UN AUTRE ?_ Du réseau de l’élite aux scandales en série : brève histoire de Facebook, par Nikos Smyrnaios Facebook et les médias, une liaison


diaboliquement complexe, par Nathalie Pignard-Cheynel Facebook, média de masse : un poids à relativiser, par Coralie Le Caroff Facebook est-il dangereux pour la démocratie ? par Arnaud


Mercier -- Crédit : Ina. Illustration : Alice Durand (1) Jean Paul SIMON, “How Europe missed the mobile wave”. Info, Volume: 18 Issue: 3,2016, pp. 12-32. (2) Rapport annuel 2017, p.15 : « We


expect our rates of growth to decline in the future » FACEBOOK, UN MÉDIA COMME UN AUTRE ? - ÉPISODE 4/5 La stratégie de Facebook, leader mondial des réseaux sociaux, lui confère une place


majeure dans le champ médiatique. Dans le contexte actuel de défiance à l’égard d’Internet et des réseaux sociaux, il est essentiel de se pencher sur les usages informationnels effectifs du


plus puissant d’entre eux. FACEBOOK, UN MÉDIA COMME UN AUTRE ? - ÉPISODE 1/5 En 15 ans, Facebook est devenu l’arène centrale de l’espace public numérique, et Mark Zuckerberg, son patron,


l’un des hommes les plus influents de la planète. Influent, mais controversé. Le média de masse le plus populaire accumule les scandales. Plongée dans les coulisses de cette mutation.