Les visages de la justice dans le cher : sylvie barucco, la juge aux uppercuts
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« Vous avez le droit de nous prendre pour des imbéciles, ou de nous mentir, ou de dire n’importe quoi, mais nous avons aussi le droit de s’en apercevoir ». La phrase est rituelle. Elle
déstabilise souvent son destinataire. Quand Sylvie Barucco franchit la porte qui donne sur la salle d’audience du tribunal correctionnel de Bourges jusqu’à son fauteuil habituel, la salle
frémit d’une singulière façon. Celles et ceux qui savent à quoi s’attendre écrasent un petit sourire, comme la promesse d’un instant à part. Ou, au contraire, ils répriment un hoquet
perceptible. De toutes façons, à la fin, c’est toujours la justice qui a le dernier mot. Celles et ceux qui ne savent pas, le découvrent souvent à leurs dépens. La juge, robe noire,
impassible, lunettes et cheveux blancs assumés, inspire des sentiments contradictoires. Elle rythme ses audiences avec une répartie qui s’approche de l’uppercut. Il laisse sonné, souvent
pantois. L’humour dense croise l’ironie tranchante quand c’est nécessaire, et, cramponné à sa barre, le prévenu qui a osé outrepasser la bienséance que réclame ce genre de rendez-vous passe
un pénible quart d’heure. Un prévenu, en short, est, un jour, reparti mettre un pantalon. Les tenues trop estivales, trop négligées, les impolitesses, les voix trop basses, les trop sûrs
d’eux, les amnésiques, les repentis de dernière minute, s’attirent les foudres sarcastiques de la présidente du tribunal. Exemple. « Ah c’est marrant, tous ceux qui sont à la barre ont un
rendez-vous avec Pôle emploi demain… » Souvent, aussi, en l’absence des codes judiciaires, les non-initiés s’affalent sur la barre comme on le ferait au comptoir des regrettés bistrots de
quartier. Vrombis la phrase coup de poing : « Je n’ai pas l’intention de vous servir un café, nous ne sommes pas au café du Commerce. » Foudroyé, le locataire de la barre se redresse et se
trouve soudain embarrassé de ses mains.