Choose France : le roi Macron brille, la France cale

Choose France : le roi Macron brille, la France cale


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Bercy n'en finit plus de jubiler. Mardi 20 mai, le ministère de l'Économie, tout auréolé de fierté, se rengorgeait encore des résultats éclatants de Choose France, cette


grand-messe orchestrée la veille à Versailles par un Emmanuel Macron en majesté. Exceptionnel. Exceptionnel. Exceptionnel ! On ironise à peine, tant la communication gouvernementale déborde


d'enthousiasme.


Jugez un peu : « Une huitième édition avec un niveau inédit de 53 annonces pour 40,8 milliards d'investissement. Choose France 2025 fait une fois de plus la démonstration de


l'attractivité industrielle de la France. Ces milliards d'euros d'investissements étrangers dans les navires de croisière, les carburants durables, le recyclage des textiles,


ou encore les métaux de terres rares, vont contribuer à accélérer la réindustrialisation. »


À LIRE AUSSI C'EST QUOI PROLOGIS, QUI A ANNONCÉ DE GROS INVESTISSEMENTS LORS DE CHOOSE FRANCE ?Il était 20 heures quand ces conclusions triomphales sont tombées dans notre boîte mail,


comme un baume apaisant sur les angoisses nationales. Dormez tranquilles, braves gens… Mais ne rêvez pas trop. Car derrière le rideau doré de Versailles, en plein Festival de Cannes, la mise


en scène est parfaite, le storytelling, millimétré. Mais les faits, eux, sont têtus.


Certes, le chef de l'État a raison de marteler, devant un parterre de dirigeants américains et asiatiques, l'importance de créer de la valeur, d'être attractif. Mais les


chiffres se prêtent à toutes les interprétations : faut-il compter en nombre d'investissements, en capacité de production, en emplois nets créés ? Et puis, disons-le franchement, la


compétition intra-européenne n'a rien d'un sprint effréné. Dans l'Europe élargie, seuls les Britanniques et les Suisses savent encore faire la cour aux investisseurs étrangers


avec plus d'élégance – et de moyens. Et derrière cette supposée attractivité française se cachent de doux mécanismes d'incitation financière – des milliards d'aides publiques


– dont l'efficacité reste un sujet tabou.


À LIRE AUSSI INVESTISSEMENTS ÉTRANGERS : POURQUOI LA FRANCE PERD DU TERRAIN À Découvrir LE KANGOUROU DU JOUR Répondre Avec tous ces ronds de jambe, on en viendrait presque à oublier


l'essentiel : la machine France a calé. Loin des projecteurs, les entreprises tricolores, elles, s'interrogent : peuvent-elles encore espérer grandir, innover, prospérer sur leur


propre sol ? Les investissements étrangers, si joliment mis en scène à Versailles, ne sont finalement qu'un mince filet d'eau dans l'immense océan des besoins réels pour


relancer notre développement.


Le pays, lui, est à l'arrêt depuis la dissolution. Qui sait si, dans les salons dorés de Versailles, un capitaine d'industrie a eu l'audace de glisser à Emmanuel Macron


quelques vérités qui fâchent ? Rappeler le coût du travail exorbitant qui freine les initiatives, ce poids d'une dette publique qui assombrit l'horizon, ou, comble de


l'ironie, ces milliards engloutis, qui n'auront servi qu'à masquer, en vain, le cruel déficit de compétitivité du pays.