
Emmanuel Macron, la « bagnole » et « Jojo le Gilet jaune »
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« Les Français, on aime la bagnole et, moi, je l'adore ! » lançait Emmanuel Macron dimanche dernier à la télévision, dans un cri du cœur digne de la belle époque productiviste de
Georges Pompidou. Mais que connaît le président à la « bagnole », au juste ? Il n'a plus de véhicule personnel depuis son entrée à Bercy comme ministre de l'Économie en 2014, il y
a neuf ans. Depuis qu'il est à l'Élysée, il circule en DS7 Crossback blindée à moteur hybride avec chauffeur, spécialement rallongée à l'arrière de 20 cm pour davantage de
confort.
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Quel conducteur était Emmanuel Macron ? On sait qu'il a obtenu son permis B en 1998 à Amiens. Ce qu'il a nettement moins popularisé, c'est qu'il n'a pas eu le
papillon rose du premier coup : il a d'abord été recalé ! « Un très mauvais élève », de son propre aveu. On pensait que l'échec à l'entrée de l'École normale supérieure
était sa seule déconvenue, ce n'est pas le cas. « Il est rare d'obtenir son permis du premier coup […]. Je l'ai raté une fois oui, ce n'est pas glorieux », avouait-il en
mars 2022 sur M6, en pleine campagne présidentielle.
À LIRE AUSSI COIGNARD – INTERVIEW D'EMMANUEL MACRON : BEAUCOUP DE MOTS POUR – PRESQUE – RIENUn peu kéké, Emmanuel Macron, qui aime pousser les gaz en scooter des mers l'été au
large du fort de Brégançon (Var) ? Au volant, il aime taquiner le champignon, « accélérer et sentir le moteur » vibrer sous ses pieds, comme il le confiait en 2014 en marge du Salon de
l'automobile. A-t-il seulement tous ses points ? Dix années à l'Élysée sans conduire sont, à coup sûr, le meilleur des stages de récupération : après trois ans sans infraction au
Code de la route, on récupère automatiquement les douze points. Il reste aussi discret sur les modèles de véhicule qu'il affectionne, plutôt luxueux, sinon bling-bling. Dans
_C'était Michel_ (Robert Laffont, 2018), Sylvie Rocard, veuve de l'ancien Premier ministre, narrait un week-end où le couple Macron était arrivé « cheveux au vent », à bord
d'une « Peugeot décapotable toute neuve ». C'était l'époque faste où le jeune homme venait d'intégrer la banque d'affaires Rothschild.
Mais pourquoi cette sortie sur « la bagnole, moi, je l'adore » en cette rentrée, au risque d'entretenir le culte viriliste de la vitesse et des grosses cylindrées, contracyclique
avec les impératifs écologiques de l'heure ? Quand il a besoin de faire « popu », de parler à la « France d'en bas » chère à Jean-Pierre Raffarin, le président, tel un
prestidigitateur, tente souvent d'effacer les polémiques à coups d'expressions familières fleuries – « carabistouille », « galimatias », « ça m'en touche une sans bouger
l'autre » « c'est de la pipe », quand il n'invoque pas Gérard Majax ou « Jojo le Gilet jaune », son « Madame Michu » à lui.
Or, ces derniers jours, il y avait urgence à effacer les fastes du dîner de Versailles autour du roi Charles III, au moment où nombre de Français peinent à boucler les fins de mois sur fond
de forte inflation dans les rayons. « Ils auraient pu éviter le homard en entrée, quand même ! » s'offusque un stratège des Républicains, c'est dire. Il s'agissait surtout de
faire oublier l'énorme loupé du gouvernement sur la vente à perte des carburants, que les distributeurs ont snobée, infligeant un camouflet à la Première ministre, Élisabeth Borne.
Voilà donc le président qui dégaine un énième chèque de 100 euros pour les gros rouleurs, et ce, à la veille de la présentation de son programme de planification écologique, tout un symbole
du « et en même temps » de l'exécutif sur la transition verte.
Emmanuel Macron sait ce qu'il en coûte de toucher à la « bagnole », vache sacrée des Français : la hausse de la taxe carbone sur les énergies fossiles et la limitation à 80 km/h sur les
routes secondaires, promue par Édouard Philippe, avaient provoqué en 2018 une quasi-révolution. De même, à l'été 2021, le président avait expressément demandé à ce que soit différée la
mise en place – imposée par la législation européenne – d'un contrôle technique pour les deux-roues.
À Découvrir LE KANGOUROU DU JOUR Répondre Un projet qui avait suscité l'ire des motards, prompts à se mobiliser et qui entrera finalement en vigueur progressivement et de façon allégée
d'ici à 2027. Plus récemment, le gouvernement a aussi fait barrage aux tentatives parlementaires d'abaisser la vitesse maximale sur autoroute de 130 à 110 km/h. C'était une
des propositions de la convention citoyenne sur le climat. En 2020, la ministre de la Transition écologique, Élisabeth Borne, s'y était pourtant dite favorable parce qu'elle
permettait une réduction des émissions de gaz à effet de serre de l'ordre de 20 %. Exit donc l'écologie punitive, trop périlleuse socialement.
Il n'empêche : si le chef de l'État aime la « bagnole », c'est plutôt en mode électrique. D'où son grand projet de permettre aux plus modestes de s'offrir un
véhicule propre grâce à une location de longue durée (leasing) de 100 euros par mois. Il ambitionne d'en produire pas moins de 1 million sur le sol français d'ici au terme de son
mandat. Le temps presse. À partir de 2025, « Jojo le Gilet jaune » ne pourra plus circuler avec un véhicule polluant dans les agglomérations de plus de 150 000 habitants estampillées ZFE
(zone de faible émission), une bombe sociale à retardement. Et à compter de l'année 2035, terme de la vente des véhicules à moteur thermique au sein de l'Union européenne, il devra
même s'en séparer ou se résigner à convertir sa vieille guimbarde.