« Une nuit au zoo » : dans les coulisses des studios d’animation français Mac Guff

« Une nuit au zoo » : dans les coulisses des studios d’animation français Mac Guff


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« UNE NUIT AU ZOO » : DANS LES COULISSES DES STUDIOS D’ANIMATION FRANÇAIS MAC GUFF


On dit que les animateurs français sont les meilleurs au monde. La légende voudrait même que le français soit la langue d'usage au sein des célèbres studios Pixar. Au pays de Molière,


cette excellence tricolore s'incarne dans les historiques studios Mac Guff, pionniers des effets spéciaux numériques et de l'animation en images de synthèse depuis 1986 (la même


année que la fondation de Pixar, l'autre pionnier du genre). À l'occasion de la sortie de sa dernière création, _Une nuit au zoo,_ l'équipe de Mac Guff nous a ouvert les


portes du studio, niché au-dessus d'un garage de voitures de luxe, en plein cœur du 15e arrondissement de Paris. Surtout connu pour avoir animé _Moi, moche et méchant_ en 2010, Mac Guff


renferme une histoire riche, très marquée par ces 40 dernières années qui ont vu le studio muter. À l'aube d'un bouleversement du métier, lié à l'intelligence artificielle,


Mac Guff nous accueille pour nous livrer les secrets de son nouveau long-métrage, en salle le 29 janvier au cinéma, une comédie inspirée des classiques de l'épouvante, où les animaux


d'un zoo font face à un mystérieux virus qui transforme leurs congénères en zombies mutants. Comme dans les meilleurs George Romero, les animaux devront mettre leurs différends de côté


pour survivre à cette nuit d'enfer et sauver les autres animaux.


« On s'est lancés pendant la découverte des fonds bleus et verts. On s'est fait connaître en travaillant sur les clips des Rita Mitsouko, des publicités, parmi lesquelles celle


avec les bébés pour Évian. On a aussi fait la première série d'animation en images de synthèse au monde : _La Vie des bêtes _[diffusée sur Canal+, NDLR] », raconte Philippe Sonrier, le


cofondateur de Mac Guff. En effet, le nom Mac Guff ne vous dit peut-être rien, mais vous avez certainement déjà vu au moins un film ou une série passés par ces studios : _99 francs, La


Haine, Blueberry, Largo Winch _ou le récent diptyque _Les Trois Mousquetaires_… Des cinéastes comme Luc Besson, Gaspar Noé et Alexandre Aja multiplient aussi les collaborations avec eux.


Au sein de Mac Guff, où près d'une centaine d'employés travaillent, on assume une double identité : le studio est non seulement dédié à l'animation, mais aussi aux effets


spéciaux numériques, récompensés par plusieurs césars (le dernier en date pour _Le Règne animal,_ en 2023). Faire cohabiter un département consacré aux effets spéciaux et un autre dédié à


l'animation reste plutôt rare dans le milieu du cinéma. Philippe Sonrier, qui est aussi le directeur général, revendique cette double casquette, refusant, lorsque le studio se met à


l'animation en 2006 avec _Azur et Asmar_ de Michel Ocelot, de renoncer aux effets visuels.


Après leur collaboration avec Michel Ocelot, les studios Mac Guff se font un nom à l'échelle internationale en animant _Moi, moche et méchant_ aux côtés du studio Illumination. Pour


l'occasion, la société Illumination Mac Guff est créée et scelle le partenariat entre les deux sociétés. À la suite du succès mondial du film, Illumination et Illumination Mac Guff sont


rachetés par Universal, avec le succès que l'on connaît aujourd'hui. Mais cela n'a pas empêché Mac Guff d'enchaîner les productions animées : _Titeuf le film, _deux


nouveaux films de Michel Ocelot… _Une nuit au zoo_ est aujourd'hui leur projet le plus ambitieux depuis _Moi, moche et méchant._ « Ce film a représenté trois ans de travail, 1 200 plans


à créer de zéro car on ne filme rien », explique Philippe Sonrier. Dans le monde actuel de l'animation, difficile d'exister en dehors de la grande franchise Disney ou Pixar. Pour


une petite production, la seule alternative est de tout miser sur l'originalité, comme nous l'explique Baptiste Salvan, producteur exécutif du film : « C'est pour cela que


nous sommes allés chercher un concept de roman graphique jamais publié de Clive Barker – l'auteur de _Hellraiser_ et _Candyman_ – en l'adaptant pour faire d'_Une nuit au zoo 


_un film pour enfants_._ Il fallait proposer des idées différentes, à la fois dans l'animation, dans le style des personnages et dans le discours. » Et ça fonctionne. _Une nuit au zoo 


_parvient à surprendre en revenant à un style cartoon assumé, loin de la course à l'ultraréalisme d'un Pixar. Sortir de la grosse franchise… Pour mieux y revenir ? « Je vous le


confirme : si ça marche, il y aura un 2, nous assure Philippe Sonrier. En animation, c'est quasiment inévitable, tant le boulot est énorme. Si on arrive à réutiliser des choses déjà


créées, il ne faut pas hésiter. Après deux ans à travailler dessus, ce n'est pas un péché de vouloir rentabiliser une création au mieux. »


Les puristes de la technologie nous assurent que, d'ici quelques années, on pourra créer des films entiers grâce à l'IA. Mais qu'en pensent les concernés ? Pour le moment, les


films d'animation signés Mac Guff ne font jamais appel à l'intelligence artificielle. Pourtant, le studio ne se cache pas d'y avoir recours en matière d'effets spéciaux.


« Depuis 1986, on cherche ce qu'on peut faire de nouveau avec l'image, nous explique Philippe Sonrier. Aujourd'hui, ça passe par l'IA, que l'on utilise


essentiellement pour modifier les visages. »


À Découvrir LE KANGOUROU DU JOUR Répondre Rajeunir, vieillir, remplacer un maquillage, Mac Guff s'en est fait une spécialité. Les stupéfiantes scènes de rajeunissement numérique dans la


série de Canal+ _Le Bureau des légendes,_ c'est eux ! « J'entends que ça fait perdre des emplois, mais souvent ça remplace des choses pas forcément nécessaires, nous rassure le


DG. Il faut travailler intelligemment. C'est une aide, et pas un remplacement. On vise l'excellence et, pour le moment, ce n'est pas avec l'IA seule qu'on


l'obtient. »


Néanmoins, quand on connaît la masse de travail à fournir pour fabriquer un film comme _Une nuit au zoo,_ certaines automatisations par IA pourraient faire gagner du temps. Carine Gillet a


supervisé l'animation du long-métrage, un travail fastidieux et minutieux. « Si les plans sont simples, on peut en faire deux dans la journée, mais ça peut aussi prendre deux semaines


pour un seul plan s'il est particulièrement compliqué », précise-t-elle. Heureusement, Mac Guff peut compter sur une armée d'animateurs formés en France, où la qualité des écoles


est reconnue dans le monde entier.