
Négociations directes avec le hamas : trump double netanyahou et fait pression sur israël
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Le président Donald Trump a annoncé dimanche la libération du dernier otage américain, Edan Alexander, détenu par le Hamas depuis le 7 octobre. Dans un message publié sur _Truth Social_,
Trump précise qu’« _il s’agit d’un geste de bonne foi envers les États-Unis et les efforts des médiateurs — le Qatar et l’Égypte — pour mettre fin à cette guerre extrêmement brutale et
permettre le retour de TOUS les otages vivants ainsi que des dépouilles à leurs proches_ ». L’absence de toute mention explicite d’Israël dans cette déclaration témoigne du fossé
grandissant entre Washington et le gouvernement de Benyamin Netanyahou, en désaccord sur plusieurs dossiers majeurs. Si Netanyahou se félicite publiquement de la libération d’Alexander —
revendiquant le fait que celle-ci a été rendue possible par « _la politique ferme que nous avons menée avec le soutien du président Trump, et grâce à la pression militaire exercée par les
soldats de Tsahal dans la bande de Gaza_ » —, en coulisses, il fulmine. Pour lui, le simple fait que les États-Unis soient en discussions directes avec le Hamas est un camouflet. L’otage
israélo-étasunien a été libéré ce lundi ; il est probable qu’en échange de la libération le Hamas ait obtenu de l’administration Trump qu’elle fasse pression sur le gouvernement israélien,
afin de le contraindre à revenir à la table des négociations en vue d’un cessez-le-feu — moins de deux mois après que celui-ci a rompu l’accord conclu en janvier. Lundi, le bureau de
Benyamin Netanyahou a annoncé l’envoi d’une équipe de médiateurs au Qatar pour négocier un nouvel accord de trêve et de libération des otages. L’un des principaux points de friction entre
Washington et Israël reste la question du programme nucléaire iranien. Netanyahou s’oppose par principe aux négociations, tandis que Washington a assoupli sa position ses dernières semaines,
laissant entendre qu’elle laissait la porte ouverte à l’enrichissement d’uranium à des fins civiles. La ligne dure du premier mandat de Trump vis-à-vis de l’Iran — marquée par le retrait
des accords de Vienne sous pression d’Israël et l’assassinat du général Qassem Soleimani — a cédé la place à une stratégie de pression maximale qui vise à aboutir un nouvel accord beaucoup
plus favorable aux États-Unis. Début mai, Trump avait déjà limogé son conseiller à la sécurité nationale, Mike Waltz, figure de proue de l’aile néo-conservatrice du parti, en raison de sa
position jugée trop belliqueuse et trop alignée sur les positions du gouvernement Netanyahou au sujet de l’Iran. Alors que les États-Unis ont conclu un accord avec les Houthis, un des
principaux proxies du régime réactionnaire iranien, Israël, dont le traité ne fait pas mention, n’a pas hésité à continuer les bombardements et à émettre de nouvelles menaces. Après une
campagne de bombardements très meurtrière, Washington avait obtenu qu’ils cessent leurs attaques contre les navires commerciaux américains, en échange de la suspension des bombardements sur
Sanaa et contre les ports contrôlés par les rebelles yéménites. En parallèle, Donald Trump a déclaré qu’il ne se rendrait pas en Israël lors de son déplacement au Moyen-Orient prévu la
semaine prochaine, au cours duquel il rencontrera l’ensemble des monarques du Golfe pour finaliser ce que certains décrivent déjà comme le « _deal du millénaire_ » — une série d’accords
commerciaux dont la valeur pourrait atteindre mille milliards de dollars. Alors que Netanyahou espérait une visite de Trump, ce revirement est perçu comme un nouvel échec pour le
gouvernement israélien. Par ailleurs, Trump devrait donner son feu vert à Riyad pour le développement d’un programme nucléaire civil, un accord jusqu’ici conditionné à une normalisation des
relations avec Israël dans le cadre des Accords d’Abraham — un nouvel indice du rapprochement stratégique entre Washington et la pétromonarchie saoudienne, qui est de plus en plus considérée
comme un partenaire régional incontournable dans la région. Alors que l’Arabie Saoudite fait de la reconnaissance formelle d’un État palestinien une condition de son rapprochement avec
Israël, la poursuite du génocide à Gaza constitue un obstacle à la politique pro-saoudienne de Trump, qui a déjà donné le marché de la reconstruction de la Syrie à la monarchie tout en
permettant à son envoyé de peser dans les discussions autour de la présidentielle libanaise. Une situation qui pourrait pousser Trump à faire pression sur Israël pour empêcher l’exécution du
plan d’élargissement des opérations génocidaires de Tsahal à Gaza, voté par le cabinet de guerre. Un plan dont le projet de Trump de faire de Gaza une station balnéaire pour milliardaires
est l’inspirateur direct. En planifiant avec la Somalie, le Somaliland, le Soudan ou l’Egypte et la Jordanie la déportation des Palestiniens, Trump a accéléré les préparatifs militaires
d’Israël pour porter à un nouveau niveau le génocide. Si Trump est, comme il se plaît à le dire lui-même, « _le meilleur ami d’Israël_ », il pourrait ainsi considérer que le moment n’est pas
opportun pour mettre en œuvre le plan du cabinet israélien ou juger qu’Israël n’a pas satisfait ses conditions - une position plus modérée au sujet de l’Iran pour ne pas mettre à mal les
négociations et de la retenue sur la Syrie dont Trump veut offrir le marché de la reconstruction à l’Arabie Saoudite. Netanyahou fait ainsi face à des pressions croissantes, tant à
l’international qu’au sein même d’Israël. Il doit affronter la fronde de l’opinion publique contre la guerre à Gaza, tandis que les familles des otages l’accusent de mettre en danger leurs
vies en poursuivant, coûte que coûte, sa guerre dévastatrice à Gaza. Cette crise de légitimité de la guerre intervient alors que Netanyahou est sous pression de l’aile messianique de son
gouvernement, incarné par Smotrich et Ben-Gvir. Les deux ministres pourraient quitter la coalition si le plan de conquête de Gaza, approuvé la semaine dernière par le cabinet de guerre,
n’était pas mis en œuvre. Un scénario catastrophe pour Netanyahou qui devrait alors rendre des comptes devant les tribunaux dans le cadre de plusieurs affaires de corruption. Comme
l’écrit Claudia Cinatti, Netanyahou « _semble avoir reçu plusieurs leçons pratiques sur la signification du slogan trumpiste “America First” », qui règle la politique étrangère du nouveau
président_ ». S’il « _ne fait aucun doute que Trump […] est plus proche idéologiquement et politiquement de Netanyahou […]_ », le président étasunien semble avoir dans l’immédiat d’autres
priorités que celles du cabinet de guerre. Alors que l’impérialisme étasunien exerce, par l’intermédiaire d’Israël, un droit de vie ou de mort sur le peuple palestinien, et que Netanyahou
veut accélérer le génocide, le mouvement de solidarité doit s’élargir. D’autre part, Trump entend renforcer les régimes les plus réactionnaires de la région, qui répriment les sentiments
pro-palestiniens de leur peuple et leurs aspirations à la liberté politique et à une vie meilleure, tout en offrant de nouvelles sources de profits aux bourgeoisies arabes des États voisins
d’Israël. Face aux plans de l’impérialisme étasunien et au génocide du peuple palestinien, la mobilisation des masses arabes est tout autant cruciale. Elle seule pourrait empêcher Israël de
poursuivre sa guerre génocidaire à Gaza et en Cisjordanie tout en privant l’État colonial de l’appui complice des bourgeoisies réactionnaires en Égypte, en Jordanie, en Irak ou dans les
pétromonarchies du Golfe.