
Université de Bordeaux : une chercheuse évincée pour son engagement écologiste
- Select a language for the TTS:
- French Female
- French Male
- French Canadian Female
- French Canadian Male
- Language selected: (auto detect) - FR
Play all audios:

Alors qu’elle devait débuter son travail en post-doctorat au Laboratoire bordelais de recherche en informatique (LaBRI), rattaché à l’université de Bordeaux, Ada (prénom modifié),
doctorante, apprend que l’accès au laboratoire lui est refusé – sans motif.
En effet ce laboratoire est classé zone à régime restrictif (ZRR) comme 931 autres en France en 2024. Cela signifie que pour y entrer il faut que le haut fonctionnaire de défense et de
sécurité du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche émette un avis favorable. Une sollicitation qui légitime ainsi des services de de la DGSI pour mener une enquête sur la
vie des personnes nécessitant cette autorisation. Ainis, pour pouvoir travailler dans un laboratoire classé ZRR, toute personne doit donner des informations privées telles que les voyages
réalisés à l’étranger les cinq dernières années, le nom du/de la conjoint.e, de son employeur, etc. Des informations qui se combinent aussi à des positionnements ou à des événements
politiques, comme la doctorante le soupçonne.
Ce système de ZRR entrave directement la liberté de recherche et la liberté d’expression des scientifiques. Car non seulement le personnel de ces laboratoires est trié sur le volet, mais il
se retrouve empêché de s’exprimer. L’université de Lille a par exemple intégré en 2024 une motion permettant de censurer les chercheur.ses : « Pour les secteurs scientifiques protégés, toute
communication, y compris les enseignements, qu’il s’agisse d’un colloque, d’un séminaire ou d’un congrès, est soumise à autorisation du HFDS [haut fonctionnaire défense sécurité] sur
saisine du/de la FSD [fonctionnaire sécurité défense] compétent(e) ». Une censure politique qui vise à maintenir une certaine neutralité de la science, dont l’unique objectif serait de
conseiller les institutions, sans jamais prendre directement position par son statut dans des sujets de société ou sur la recherche en général.
Un dispositif d’autant plus inquiétant en période de militarisation à marche forcée et de l’importance grandissante des entreprises, notamment dans le secteur de l’armement, au sein des
universités et des laboratoires.
Depuis 2014, la CGT FERC Sup et le SNTRS-CGT dénoncent ce dispositif entraînant des dérives sécuritaires, des discriminations, des restrictions de prises de parole. Par exemple, Baptiste
Pagnier, de la CGT des établissements d’enseignement supérieur et de recherche décrit ainsi la situation : « Il y a beaucoup de refus à bas bruit, concernant très majoritairement des
étrangers. Les contestations en justice sont peu nombreuses, et rarement gagnantes. »
De plus, un décret paru en mai 2024 a encore renforcé le pouvoir du ministre et les sanctions pour le personnel ne respectant pas l’obligation d’information sur leurs activités.
Si le gouvernement prépare les esprits à accepter la guerre, les étudiant.es ne sont pas prêts à l’accepter. C’est ce que montrent les nombreuses mobilisations contre les partenariats des
universités avec les entreprises d’armement, contre le génocide en Palestine, et ce malgré une répression féroce.
Il est urgent que les étudiant.es, les enseignant.es-chercheur.ses et les scientifiques s’organisent pour une recherche réellement indépendante, sans financements privés, et sans validation
par les ministères. Il faut affirmer que la science et l’université doivent être mises au service des travailleurs et des classes populaires et les savoirs au service du bien commun.