
Haute joaillerie : des gemmes à géométrie variable
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Contrairement à la haute couture, qui est une appellation ancienne, spécifiquement française, attestée dès 1880 et aujourd’hui protégée, la haute joaillerie ne fait l’objet d’aucune
définition précise. Ce terme n’apparaît pas dans les archives des grands magazines de mode ; à peine voit on se profiler ici et là de manière sporadique l’expression grande joaillerie que
les chroniqueurs accolaient aux joyaux exceptionnels durant la deuxième moitié du XXe siècle. Son existence n’est est pas moins réelle et les résultats présentés par le groupe Richemont
(propriétaire de Cartier et Van Cleef & Arpels) il y a 2 semaines attestent la vitalité d’une activité qui permet de désarmer les soubresauts de la conjoncture. Disons, pour résumé, que
la réalité commerciale incarnée par la haute joaillerie, repose, malgré l’absence de règles, de statuts ou de définitions, sur des pièces uniques, souvent regroupées en collection, qui
mettent en lumière des gemmes remarquables et un savoir-faire justifiant des prix compris entre 50000 et plusieurs millions d’euros.
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Ces gemmes remarquables, au-delà de leur valeur intrinsèque, sont au service d'une narration créative qui vise à enflammer l'imaginaire et le désir tout en exaltant le prestige
d'une signature. Ce récit enchâssé dans les pierres impose à chaque maison de posséder un « œil » qui va déterminer le choix d'une teinte, d'une vivacité, mais aussi
d'une forme et d'une taille.
« Bvlgari, c'est l'art de la couleur » indique Corinne Le Foll, directrice de la division joaillerie Bvlgari, qui présentait fin janvier, place Vendôme, une masterclass dédiée aux
nouveautés Haute Joaillerie de la maison italienne. « Cet art s'épanouit tout d'abord dans des associations souvent uniques. Le collier Infinite Blossom par exemple concilie le
rouge profond de la rubellite et le vert vif, presque printanier, du péridot que rehaussent des petites touches d'éclat apportées par l'améthyste, le spinelle, le diamant mais
aussi par la nacre qui donne à l'ensemble un liant, une harmonie ». Cet art s'ordonne également autour d'une science de la taille. Davantage qu'une simple accumulation de
pierres fines et précieuses, ces sélections minérales s'apparentent à une philosophie. « Nous aimons donner à voir, ou plutôt à ressentir, des atmosphères dans nos créations. De
nombreux paysages romains se sont forgés sur la juxtaposition de cultures, de mouvements artistiques : ce syncrétisme rejaillit sur nos productions. Une forme cabochon ou pain de sucre
évoquera un dôme, une taille marquise rappellera le demi-cercle formé par une rotonde, une marqueterie de pierres dures convoquera le souvenir d'une mosaïque. »
Cartier, depuis plus d'un siècle, déjoue la linéarité du temps en ciselant un style qui emprunte son essence à la polyphonie de l'écriture musicale. A la coupure radicale entre le
passé et le présent, les collections de haute joaillerie dévoilées par la maison française privilégient un système de représentation qui permet le développement simultané de plusieurs
thèmes. Cette coexistence entre différentes chronologies entremêlées s'exprime par la présence sur une même pièce contemporaine de motifs, de couleurs, de rythmes sur lesquelles se
transposent les principes à l'œuvre dans l'art déco, dans le style guirlande, dans la joaillerie indienne ou figurative. Cette oscillation entre la permanence et le changement se
manifestait notamment sur un collier Echina – issu du chapitre III, présenté à Paris fin janvier, de la collection Nature Sauvage – qui conjuguait dans une partition inédite le monde animal
et la maitrise géométrique. Sur un lacis ajouté de diamants, qui évoquait tout à la fois l'abstraction graphique d'une figure fractale ou l'épure ornementale d'une
fresque ottomane, jaillissaient des boules coutelées d'émeraudes piquées de corail et des billes de saphirs agrémentés de diamants : cette union de teintes et de formes ressuscitaient
la palette chromatique des ballets Russes et le gout de l'orient pour les gemmes gravées.